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Parcours nietzschéen - Structures cachées




STRUCTURES CACHÉES
 
Cette recension est extraite de l’ouvrage de Louis-José Lestocart intitulé « L’intelligible connaissance esthétique[1] »
 
Bruit et communication bruitée
 
Si l'on reprend cette division des idées, mise en avant par Galton dans sa métaphore chambre d'audience et antichambre, il apparaît bien comme le souligne Nietzsche que les idées les plus importantes, les plus fondamentales sont celles qui demeurent assises dans une salle d'attente jusqu'à ce que l'on « vienne les chercher ». Elles sont cachées à la conscience en tant qu'elles ont du mal à se définir, à se localiser. Idées voilées de différentes manières, suivant le domaine d'investigation pris en compte. Cette notion de caché, de dissimulé dans la compréhension de la réalité, qui implique la situation d'un « réel proche » et d'un « réel voilé » (selon Bernard d'Espagnat), peut ramener à celle de structures cachées, non détectées, inobservables en tant que telles, (comme l'ont été longtemps les objets de la physique quantique, par exemple), mais vivant grouillement de possibles, qui agissent tant sur la perception continue fournie par les organes des sens, que sur l'interprétation de la création artistique. Ces structures constituent également ce que C. E. Shannon nomme le bruit dans l'information (Une théorie mathématique de la communication, 1948). Or ce bruit, qui peut agir aussi dans la réflexion, paraît absolument nécessaire à la compréhension, tout comme il est nécessaire au décryptage des messages et à leur compréhension.
La notion de bruit dû à l'énergie thermique dans les conducteurs lors des transmissions apparaît dès 1925. Par la suite, ce bruit aléatoire intervenant dans la transmission est particulièrement étudié aux Etats-Unis et fait l'objet de travaux en physique, en mathématiques et en statistiques, de même qu'en télécommunications.
Tandis qu'on cherche un moyen de communiquer en toute sécurité, en 1942 est mis au point le spectrographe acoustique (moyen de rendre un son visible)[2]. Le concept mathématique de la communication de 1948 deShannon– ainsi que la Théorie de l'information de Shannon et Warren Weaver (1949) –, fournit une mesure quantitative de la notion d'information apportée dans un contexte particulier, celui de la transmission d'un message (ou lors d'une observation). L'entropie de la mécanique statistique (théorème H de Boltzman) correspond à cette mesure quantitative.
Dans la théorie statistique de l'information, l'entropie shannonienne reprend la formule de Boltzmann. Avec Shannon, l'information devient une grandeur mathématique comprise comme objectivement quantifiable et entendue comme ensemble de signes. Celui-ci explicite la nature du rapport information et communication. Il expose 23 paramètres portant sur certaines conditions nécessaires et instrumentales de la communication. Le concept mathématique de l'information se compose en quantité d'information qui devient une grandeur mathématique. Le langage demeure essentiel à la communication. Le choix de l'unité de mesure se fait en chiffres binaires (binary digits)[3], soit par contraction des bits. Le langagedemeurantessentielà la communication. E devient le signal reçu ; S, le signal émis ; N, le bruit avec deux types de bruit (l'effet de distorsion et le bruit qu'on ne peut représenter que par une variable aléatoire). Le bruit devient ainsi seconde variable dans la fonction de transmission et s'intègre alors dans un monde de communication plus complet avec un rôle symétrique à celui de l'émetteur[4]. On peut aussi formuler ce même concept d'information dans un autre contexte, celui d'organisation[5]. L'émergence d'information dans un système complexe, par exemple, est équivalente à une émergence d'énergie. Pour aller vite, mais cela n'en est pas moins juste, nous dirons que donc ces structures – vision des choses cachées devenues manifestes –, répondent à un processus auto-organisationnel par le biais d'une circularité, en un mouvement conjugué de l’agir et du réagir.
 
Stabilité structurelle et morphogenèse[6]
 
Ces structures cachées ne le sont pas tant dans notre inconscient – même si l'inconscient ou du proto-conscient (voire un infraconscient) peut participer au fait du déchiffrement, de l'entendement. Notamment par le scanning inconscient[7] (balayage inconscient) décrit par A. Ehrenzweig dans L'ordre caché de l'art[8], qui fera l’objet de recensions ultérieures.
Ce qui nous intéresse présentement, c’est d’évoquer les expériences que James Crutchfield, physicien à Berkeley, a faites depuis le début des années 1990, au Santa Fe Institute avec des machines computationnelles complexes, appelées epsilon-machines (e-machines).
L'e-machine, automate discret à états finis (sorte de machine de Bernoulli-Turing), dont les propriétés conduisent à des estimations quantitatives d'entropie et de complexité, s'avère en effet capable d'atteindre le maximum de pouvoir de prédiction concernant la totalité d'un système (y compris ses variables cachées), et non simplement un de ses composants. Avec l'e-machine, il devient en effet possible de voir s'il existe des états intérieurs au système décrivant son comportement de façon concise. L'e-machine qui peut construire des automates de Markov à états finis[9] est donc la représentation idéale du nombre d'états  « cachés » et de leur structure de transition. Les recherches de physique et de dynamique chaotiques au Santa Fe Institute de Cosma Rohilla Shalizi ont abouti ainsi à la création d'un nouvel algorithme, le CSSR (Causal-State Splitting Reconstruction). Prolongeant l'apport de Crutchfield, le CSSR vise à établir, via la complexité statistique, le lien entre entropie et causalité. Il exploite les propriétés entropiques d'un système pour à la fois y construire et en extraire la dynamique discrète de modèles de Markov cachés (HMMs, Hidden Markov Models). Cet algorithme permet donc de filtrer automatiquement les configurations changeantes des systèmes dynamiques spatiaux pour y détecter des corrélations provenant d'un mécanisme inconnu et en extraire des propriétés qualitatives, en forme de structures logiques (particules et autres structures plus compliquées). Ce filtre générant dès lors plusieurs genres différents de structures spatiales à la fois rendues détectables et porteuses d'information.
La complexité statistique est ainsi devenue proprement « mesure ».de l’auto-organisation. On dira qu’un système s’auto-organise lorsque sa complexité statistique augmente sans cesse. Le terme « états causaux » désigne l’information minimale (c’est-à-dire la mémoire que le système utilise pour produire de nouvelles valeurs) en partant de phénomènes strictement de bas-niveau (lower level), seulement nécessaires pour « prédire » le futur », observation de haut-niveau (upper level) de façon optimale.
 
L’ intuition de L-J Lestocart
              
(Son idée ? Sa théorie ?) est que l'interprétation, l'entendement proviennent d'une vision du futur. D'une « prédiction » de lisibilité maximale en quelque sorte sur la chose considérée. Ni reconstruction du monde à la Kant, ni empirisme à proprement parler, il pourrait s'agir d'une approche intermédiaire où l'interaction entre observateur et chose considérée, produit du sens, au sens où de l'information devient visible sur cette chose – dans le champ artistique, il peut s'agir d'un tableau, d'un film ou d'une vidéo –, et simultanément dans le cerveau/entendementdel'observateur.Ce quel'onpeut rapprocherdu Wit(« mot d’esprit ») de certains philosophes du XVIIIe siècle[10]. Auxquels on peut ajouter le juriste, philosophe et professeur de rhétorique italien G. Vico (1668-1744) et son concept d'ingenium et de métaphore[11].
Il a alors lié empiriquement ces recherches réalisées dans l'orbe du Santa Fe Institute avec des exemples divers du domaine artistique. Tels le tableau de Francis Bacon (Etude d'après le portrait du Pape Innocent X de Vélasquez, 1953), les vidéos du vidéaste et artiste multimédia G. Hill comme Happenstance (Part One of many Parts, 1982-83) et les vidéos numériques de deux cinéastes expérimentales M. Klonaris et K.Thomadaki {Pulsar, 2001 ; Angel Scan. The Angel Expérience, 2007). Il s’est ensuite interrogé sur les conditions d'apparition de ce déchiffrement d'information qui semble perçu et reconstruit dans le tableau de Bacon et en quelque sorte montré dans les exemples vidéos.
Comme si on assistait à « un aller-retour constant entre la perception comme preuve des réalités extérieures et la pensée comme preuve d'une réalité interne[12] » il réside dans ces œuvres une idée profonde d'autoréférence avec boucle de récursion/récursivité qui inclut et presque enveloppe le spectateur dans l'opération de déchiffrement, laquelle comporte alors clairement une partie physique (et physiologique) et une partie psychique. Il existerait donc dans certaines œuvres d'art (ou dans toutes), un sens caché, leur sens que je ne peux réduire, synthétiser en un seul « objet ». Un sens caché qui, par désenfouissement, voit s'entrelacer inextricablement concepts, données, tout autant physiques que psychiques, et mots et signes (comme dans l’Happenstance de Hill). Comme preuve d'un véritable mélange de perception et d'intelligibilité.
Que serait finalement la complexité si ce n'est le fait de s'apercevoir de l'existence de  phénomènes inobservés et inétudiés jusque-là? Et que serait un second ordre de la Complexité, si ce n'était celui de les lire et les comprendre ? C'est peut-être là que se trouve la source la plus vive et profonde d'un art entendu dans ses complexités, un art que l'on ne peut réduire à des explications finies et fermées. L'esthétique est un compromis entre la surprise et la lisibilité, entre le pouvoir de l'imaginaire et l'intelligibilité[13]. C'est ce qu’il a essayé de dire dans Entendre l'esthétique dans ses complexités (2008).
 
Effets miroirs
 
Les structures cachées – auxquelles peut s'ajouter la vision/pensée de l'Eternel Retour (qui en est un des constituants) –, peu explorées en tout cas, sont visibles pour qui sait les voir. Elles peuvent relever de la linguistique en ce qui concerne la distinction entre structure superficielle linéaire (ou shallow structure) et structure profonde (Chomsky). Elles peuvent aussi relever de la philosophie comme dans le cas de Nietzsche et ce qu'il a synthétisé au sein de sa conception de l'Eternel Retour. Elles sont, via cette notion de structure profonde (pour partie), cette voie organisatrice nécessaire à la poursuite de l'évolution qui développe/orchestre les formes (sujet, temps, espace, société, signification, etc.). Le succès relatif de la théorie des catastrophes du mathématicien R. Thom, jetant les fondements d'une autre sorte de philosophie y compris esthétique, s'explique aussi par cela. Il existe un logos, organisateur des choses qui fait tout voir sans rien réellement montrer, un logos sous-jacent aux phénomènes perçus jusqu'ici et reconnus comme ayant une existence indépendante de la volonté, propre à traduire le visible qualitatif en un invisible quantitatif et qui ramène sans cesse la variété infinie des formes fuyantes, sans cesse changeantes, qu’on a devant les yeux, à un schème général. Si, dans un premier temps, les structures cachées peuvent théoriquement et pratiquement être rendues lisibles via les études sur les systèmes dynamiques non-linéaires, notamment grâce au filtre CSSR, il convient cependant d'ajouter un autre niveau de vérification. Celui des neurosciences.
Certaines expériences empiriques qui lui sont propres, diverses sensations « étranges » ressenties lors d'exposition d'œuvres d'art ,de visions de films, de lectures de textes littéraires ou philosophiques ou même de structfig1.jpgmoments singuliers de la vie, ont assez tôt conduit L-J. Lestocart à s'interroger sur certains phénomènes inhérents à la perception et à l'entendement. Cette sensation d'une intensité particulière notamment avec cette impression de suspension du temporel a été décrite chez l'écrivain irlandais J. Joyce (1882-1941) sous le terme épiphanie.[14] Une grande partie de sa recherche récente provient à l'origine principalement d'une telle expérience esthétique vécue devant le tableau de Francis Bacon Etude d'après le portrait du Pape Innocent X de Vélasquez vu dans la grande rétrospective du peintre au Centre Pompidou en 1996. Devant ce tableau, pour lui, des « variables cachées indétectables » semblent s'afficher puissamment dans le cerveau, au point de vue physiologico-biologique et au point de vue épistémologique, tant les yeux reçoivent une chaîne ininterrompue de sensations et de perceptions mêlées d'excitations visuelles diverses. Telle la progression d'une métaphore dans un poème, l'évidence d'une force qui s'impose, une nouvelle condition d'intelligibilité s'accompagnant d'une cascade de mots, de phrases cascade de transitions d'un état à un autre ; – une suite de fragments encore informes qu’il a vus comme déchiffrables dans leur ensemble et qui pourrait peut-être donner lieu à une véritable modélisation pour analyser cette naissance de formes.
Ce surgissement d'un « autre monde » qui, dans une expérience esthétique, donne le nombre maximum d' « idées » dans le minimum de temps, a été théorisé par George David Birkhoff (1884-1944) dans Aesthetic Measure, article de 1928[15]. Birkhoff – disciple de Poincaré, qui propose une théorie mathématique de l'esthétique et a passé un an à étudier l'art, la musique et la poésie des différentes cultures à travers le monde –, définit ce type d'expérience, par le biais de limit-cycle (feedback). Il y introduit ainsi des notions de mouvements minimaux et récurrents avec concept d'« attracteur » (comme le seront plus tard les « attracteurs étranges » des théories du chaos[16]). Aesthetic Measure énonce un principe de perception et d'interprétation en trois moments successifs ; dont le troisième se rapproche des propres recherches de L-J. Lestocart : « 3° ensuite la perception consciente que l'objet jouit d'une certaine harmonie ou symétrie ou ordre (O), plus ou moins caché, qui semble être une condition nécessaire, sinon suffisante, pour l'expérience esthétique elle même.[17] »
Quelques années après la visite de la rétrospective Bacon à Beaubourg, L-J. Lestocart s’est tourné vers les neurosciences par une étude oculomotrice sur des peintures originales du peintre lors de l'exposition Le sacré et le profane (Musée Maillol, Paris, avril-août 2004) qui lui était consacrée[18]. Cette recherche épistémologique qui a été menée au Laboratoire de Physiologie de la Perception et de l'Action (Collège de France) avec Z. Kapoula (directrice de recherches au CNRS) et a donné lieu à une publication[19], qui ne l’a pas pleinement satisfait. La perception, le ressenti devant certaines œuvres de Bacon, ou films ou vidéos ou films expérimentaux, comme ceux dont il a parlé, ne lui semblaient pas pris réellement en compte par les approches cognitivistes habituelles. Qui plus est, cette étude, n'interrogeait pas la sensation de « futur » fortement éprouvée au cours de ses propres perceptions empiriques ; ainsi que cette forme d'« empathie » qu'évoque Birkhoff. Était aussi déjà ancré en lui le fait que certaines œuvres d'art « représentaient » en quelque sorte ce qu’il pouvait subodorer:ilyexistaitdes parties cachées – « un inexplicable qui nous requiert » (Bacon) –, qu'une « certaine perception » pouvait dévoiler de façon instantanée. Les approches sur les états causaux de Crutchfield et Shalizi en particulier avaient amené à la connaissance de l'existence d'un filtre/algorithme permettant de « voir » ce qui peut résider derrière la notion de complexe. Par ces nouvelles investigations, qui donnèrent lieu à de nouveaux articles, ainsi que par des conférences à l'Institut des Systèmes Complexes (Paris), s’offrait à lui l’opportunité de proposer l'hypothèse que les œuvres (en particulier les images animées) contenaient des processus stochastiques internes ou figurés, se couplant avec des processus de même nature s'effectuant dans le cerveau de l'observateur, et que la rencontre des deux produisait le sens, l'interprétation, ce que l'on recouvre improprement par le terme « sentiment esthétique ».
Cette hypothèse un peu « pionnière » peut, pour le moment, en dernier ressort, proposer d'autres éléments à même d'explorer sa pertinence, en particulier les « neurones-miroirs », découverts depuis 1996, chez les primates, puis chez l'homme par le physiologiste et neuroscientifique, G. Rizzolatti (Département des Neurosciences, Section de Physiologie, à l'Université de Parme), via, entre autres, une imagerie cérébrale de type IRMf (Imagerie fonctionnelle par Résonance Magnétique). Ces neurones, situés dans l'aire F5 du cerveau, créent, par couplage avec des neurones « traditionnels » – dévolus eux à s'activer pour un acte moteur déterminé et sélectif –, un champ spatio-visuel extrêmement élaboré. Champ qu'on peut appeler « futur » ou encore enlightment, sujet à évolution et visant à reproduire « mentalement », virtuellement l'action envisagée, le mouvement. Ces neurones miroirs ont la capacité d'imitation et de simulations des actions proposées, ils les calculent en quelque sorte, en dressent les probabilités, en dessinent le futur. Ces processus d'imitation s'étendant entre le cerveau et la perception, à l'intérieur de l'objet considéré, restituant le temps même de sa fabrication ou de sa conception – où l'artiste peut aussi mimer, représenter le regard du spectateur –, pouvaient à leur tour expliquer le subit déchaînement d'informations se portant au cerveau ; déchaînement qui nous revient, il faut le préciser, après s'être logé dans les choses. Ces structures devenant doublement lisibles en tant qu'elles se révèlent elles-mêmes en tant que processus agissant. Des recherches récentes menées à l'aide de réseaux de neurones, notamment par le physicien W. Bialek (NEC Research Institute, Princeton), le biophysicien I. Nemenman (Los Alamos National Laboratory) et le neuroscientifique N. Tishby (School of Engineering and Computer Science, Hebrew University, Jérusalem), ont aussi mis en lumière de telles assertions par l'existence de potentiels d'actions (spikes), provenant d'influx nerveux particuliers amenant à découvrir de nouveaux phénomènes dans la perception[20]. Ce sont ces voies, avec quelques autres encore, qu'il conviendra de suivre.


[1] Ed. l’Harmattan, janvier 2010.
[2] Représentant l’amplitude du son dans un diagramme son/fréquence, il sera utilisé le jour du Débarquement (6 jun 1944).
[3] Ce sont les chiffres binaires, 0 ou 1 qui constituent chacun une unité d’information.
[4] Shannon et Weaver (1949) The Mathematical Theory of Communication, Urbana, The University of Illinois Press.
[5] De même, Shannon, mathématicien-généticien, s’intéresse aux problèmes de transmission dans la génétique.
[6] Ensemble des causes qui déterminent la forme et la structure des organismes; connaissance de ces causes et des lois qui les résument.
[7] A. Ehrenzweig ; « La perception indifférenciée pour saisir en un seul acte indivis de compréhension des données qui seraient incompatibles pour la perception consciente. » p.66.
«  Prendre un plaisir plus intellectuel à l’art n’est pas forcément en attendre un sens littéraire précis. L’essentiel de la communication artistique se place à un niveau psychologique plus profond, au lieu même de la conversation de l’artiste avec son œuvre, au lieu du scanning inconscient et de l’intégration, qu’un examen purement intellectuel trouverait facilement chaotique et dépourvu de sens. » p. 150.
« La vision inconsciente (subliminale) se révèle ainsi capable de balayer des structures sérielles et de rassembler plus d’information qu’un examen conscient cent fois plus long. La vision subliminale enregistre les détails avec la même acuité, sans tenir compte de leur appartenance à la figure ou au fond. » p. 67.   
[8] A . Ehrenzweig, né à Vienne en 1908, est mort à Londres en 1966, peu de temps après qu’il eut terminé ce livre, publié en 1967, auquel il travailla pendant plus de douze ans.
[9] Plus exactement des phénomènes de Markov cachés ou encore des automates de Markov à états cachés. Soit des chaînes de Markov dont l’état n’est pas observé directement mais qui doit être estimé à partir d’observations bruitées.
[10]  Soit une théorie de saisie immédiate du « sublime ». Comme on peut la voir exprimée tour à tour par des empiristes tel le philosophe, et homme politique anglais A. Ashley-Cooper, le philosophe écossais F. Hutcheson, le philosophe, économiste et historie écossais David Hume (1711-1776) avec une idée de primat de l’imagination sur la raison..
[11]  L’ingenium latin, en italien l’ingegno, est vue par Vico en tant que puissance imaginative fertile en métaphores. Elle est en même capacité à faire et à comprendre. Par là elle se ramène à une faculté intuitive d’interprétation.
[12] Cette formule a été suggérée à L-J Lrestocart par le physicien et biologiste Simon Diner.
[13]  « L’œuvre d’art n’est plus un objet dont on contemple la beauté bien fondée mais un mystère à découvrir, un devoir à accomplir, un stimulant pour l’imagination (Umberto Eco) »,  L’ ‘œuvre ouverte, 1965, Seuil, p.21.
[14] Mot particulièrement utilisé par Joyce, par lequel il décrit une soudaine prise de conscience de l’« âme » de quelque chose. Moments d’extase sans lesquels il n’y a pas d’artistes. « L’épiphanie est à la fois une ‘découverte’ du réel et sa ‘définition à travers le langage’», Umberto Eco (1965) L’œuvre ouverte, op.cit
[15] Repris dans Birkhoff (1933), Aesthetic measure, Harvard University Press.
[16] Ces idées se retrouvent en particulier dans Dynamical systrms (1927) qui introduit la notion de systèmes dynamiques.
 
[17]  M (effet de la densité des relations d’ordre) = O/C.
 « L’expérience esthétique type peut être regardée comme renfermant trois moments successifs : 1° un effort préliminaire nécessaire pour bien saisir l’objet, et proportionnel à sa complexité (C) , 2° le sentiment du plaisir ou mesure esthétique (M) qui récompense cet effort préliminaire ; 3°la perception conscient que l’objet jouit d’une certaine harmonie ou ordre (O) plus ou moins caché, qui semble être une condition nécessaire, sinon suffisante, pour l’expérience esthétique elle-même ».
[18] Les déplacements des yeux des sujets de l’expérience sur les toiles ont été enregistrés avec un capteur rapide comprenant deux petites caméras vidéo capturant l’image de l’œil 200 fois par seconde : un Chronos (Skalar médical).
[19] Kapoula&Lestocart(2007)« Perception de l’espace et du mouvement dans Etude de chien de Francis Bacon », in Intellectica, n° 44, déc. 2006.
[20]  Les travaux de Bialek ont inspiré ceux de Shalizi, notamment avec le concept d’information Bottleneck Method (2001). Soit une prédiction d’information basée sur le déchiffrement de codes neuronaux.



Date de création : 14/12/2013 @ 11:34
Dernière modification : 14/12/2013 @ 11:42
Catégorie : Parcours nietzschéen
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