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Sciences politiques - La banalisation politique



RÉVOLUTION


(2) LA BANALISATION POLITIQUE


Extraits de « DE AUTOPSIE DE LA RÉVOLUTION » de Jacques Ellul, chez Calmann-Lévy, 1969, pp. 236-254 (Collection dirigée par Raymond Aron).

L’usage du mot révolution, son application à des réalités banales, la croyance que l’art ou la littérature sont révolution nous ont introduit dans cette banalisation. Mais on constate aussi ce phénomène dans le code politique où cependant elle aurait dû conserver sa valeur. Il faut retenir ici deux aspects. Le fait d’abord que l’Etat est lui-même devenu révolutionnaire (1), le fait que les mythes révolutionnaires sont tombés dans un plat verbalisme (2).

(1). Cette conception que l’Etat est révolutionnaire, bien plus, assimilé à la révolution est issu du marxisme-léninisme. Nous sommes en présence d’une fiction totale, mais qui a cessé de devenir fiction par le fait de la croyance généralisée par l’adhésion de l’opinion : on cesse d’apercevoir l’énormité de cette proposition. On croit et cette croyance donne réalité à la chose. Mais en modifiant, évidemment, tout ce que l’on pouvait savoir jusqu’ici sur la révolution. Dorénavant c’est l’Etat qui établit le type de la révolution, et c’est par lui qu’elle se fait.
Il y avait autrefois de dures controverses idéologiques parmi le marxistes, mais il s’agissait de doctrinaires, de théoriciens, de chefs de parti, d’hommes engagés dans la société, l’Etat. Maintenant, ces mêmes querelles se situent au niveau des chefs d’Etat et mettent en mouvement les appareils gouvernementaux. Le passage de l’antigouvernemental au gouvernemental était quand même une pilule considérable à avaler : de quoi s’étrangler. On sait comment Staline accentuant un aspect de la politique de Lénine y est arrivé : en dissociant de façon étroitement associative l’appareil de l’Etat de celui du Parti, lequel finalement possède toute l’autorité, manipule l’apparence gouvernementale. Le secrétaire général du Parti détenant la fonction révolutionnaire et donnant sa bénédiction aux œuvres de l’Etat, qui de ce fait recevait lui aussi ce qualificatif. Aujourd’hui, la situation est devenue si commune qu’il n’est plus nécessaire de prendre tant de précautions. Mais cela produit d’étranges conséquences. Une décision de cet Etat « révolutionnaire » risque (et cela se produit constamment) de le mettre en contradiction avec un autre Etat non moins révolutionnaire. C’est devenu maintenant une affaire de gouvernement.
Une si belle leçon donnée par le marxisme ne pouvait être perdue : bientôt tous ceux qui engagèrent un processus révolutionnaire firent la même assimilation, et partout l’Etat fut le détenteur de cette vérité. Mais comment comprendre la relation établie entre l’Etat et la Révolution, relation qui va jusqu’à l’assimilation ? Assurément dans la perspective marxiste-léniniste, on voit très clairement que l’Etat a son rôle à jouer dans cette révolution-là. Mais ailleurs ? Cela ne peut s’expliquer que par un changement décisif concernant la révolution même. Nous venons de dire que ce terme a pris maintenant dans l’opinion politique une connotation positive. Mais cela ne suffit pas. On a progressivement acquis la conviction que le mouvement révolutionnaire est finalement la plus profonde expression de la volonté du peuple. Le vote, même le référendum, ne sont que des pis-aller. Là où le peuple s’est exprimé directement, librement, c’est toujours dans la poussée révolutionnaire. Et depuis que le socialisme est devenu l’idée la plus banale, la plus commune de notre société (le dernier des réactionnaires étant bien obligé de reconnaître la validité de ce socialisme), il ne s’agit plus seulement de la Révolution de 1789, mais aussi celle de 1917. La révolution est purement et simplement assimilée à la volonté du peuple. Or, nous vivons en même temps sur la conviction qu’un Etat n’a de validité que s’il exprime la volonté collective. La légitimité de l’Etat repose, virtuellement, sur la souveraineté populaire. Il suffit de rapprocher les deux courants – à ce moment, l’Etat n’apparaît comme légitime que s’il est fondé sur un acte révolutionnaire au départ. Il l’est encore bien plus si sa préoccupation principale est justement de répandre la révolution, d’agir au nom de la révolution : alors là, il n’y a plus aucune faille, aucun hiatus entre l’Etat et sa propre légitimité, constamment renouvelée, non plus par quelque vote ou référendum dont on peut toujours douter, et qui n’exprime la volonté du peuple qu’en un instant, mais par l’action même de l’Etat : si la révolution est la volonté du peuple, l’Etat qui fait la révolution se trouve en accord permanent avec son peuple. Syllogisme ? non point ! Réalité bien plus concrète que toutes les théories politiques, reposant sur la croyance commune, l’adhésion du cœur et les lieux communs. L’important est ici de comprendre que ce sont des idées progressivement formées dans l’ensemble de l’opinion, parallèles en quelque sorte, sans contact rationnel l’une avec l’autre, mais qui, se trouvant dans la même personne ont cette cohésion d’évidence bien plus solide que toutes les démonstrations. Et nous arrivons à l’impérieuse nécessité pour un gouvernement de se proclamer révolutionnaire ; s’il ne le fait pas, il ne plus paraître aux yeux de l’homme de la rue comme tout à fait légitime. D’autant plus que cet homme, effectivement imbu de la conviction que la révolution est excellente et seule expression de la volonté commune, en a quand même un peu peur…toutes ces émeutes, ces barricades, ces condamnations arbitraires…tandis que, si c’est l’Etat lui-même qui fait la révolution – quel apaisement ! on a toute garantie, ordre, procédure, planification, la révolution n’a plus son visage hystérique – seulement glacé. L’homme de la rue la préfère. Ainsi, par cette voie, la révolution devient l’essence même de l’Etat. Mais cette identification témoigne en même temps de l’effroyable mensonge où nous vivons, de cette dilution révolutionnaire, vulgarisation, banalisation, inversion. Car l’Etat peut-il être révolutionnaire ? Il faut avoir perdu le sens de l’Etat et de la profondeur de la révolution pour accoler deux termes radicalement contraires. A qui fera-t-on croire que la dictature stalinienne, l’hyperdictature maoïste, la technocratie soviétique actuelle, l’incohérence autoritaire de Fidel Castro sont vraiment révolutionnaires ? Malgré les démonstrations de Lénine, l’Etat est toujours en soi, où qu’il soit (dans une société socialiste ou non), quelle que soit son origine (révolution ou coup d’Etat), contre-révolutionnaire. Car il ne peut vouloir que durer et lutter contre ce qui le met en question, donc contre toute révolution. Et s’il cherche à provoquer la révolution ailleurs, c’est pour briser l’Etat adverse : c’est en tant qu’Etat qu’il agit – et sa forme n’y change rien.

(2). Cette banalisation politique de la révolution, comporte la banalisation du mythe révolutionnaire lui-même. Ce n’est pas seulement le fait d’un verbalisme révolutionnaire en opposition complète avec la réalité de la conduite, c’est également le fait de la création d’un univers mythique où l’on évolue avec aisance, c’est enfin le fait de la confusion de la révolution avec un peu n’importe quoi et entre autres la Révolution.
Dans les pays modernes, le syndicalisme n’a pas d’objectif radicalement différent de celui de la société dans laquelle il vit…Même si l’on prétend que l’augmentation du niveau de vie des travailleurs n’est pas la principale priorité des Etats, on est à même de reconnaître que cet objectif ne leur est pas indifférent. Mais est-on en mesure de créer une idéologie qui reposerait essentiellement sur la rapidité du développement du niveau de vie ? Et pourtant les divergences entre les Etats et les syndicats portent essentiellement sur ce point. Etant donnée cette impossibilité on remplace l’idéologie par un vocabulaire et des formules rituelles à quoi se ramène toute la révolution.
A un degré légèrement plus profond (mais où l’on trouve d’ailleurs aussi l’explication du phénomène d’adhésion, de croyance qui persiste dans les troupes syndicales à la phraséologie stéréotypée où la réalité ne trouve jamais tout son compte) nous rencontrons l’existence d’une sorte de mythologie révolutionnaire que l’on respire dans certains milieux, presque inconsciemment, et qui conduit à des attitudes d’évidence. Cette adhésion d’évidence conduit forcément à des mécomptes et à des interprétations ridicules ; en particulier nous sommes maintenant habitués à considérer n’importe quelle grève dure, n’importe quelle émeute étudiante comme signe, préambule, commencement de la révolution. Le mythe ayant un caractère de croyance indiscutable et de globalité permet à la fois l’interprétation et le classement. A partir du moment où on vit dans le mythe révolutionnaire, d’un côté tous les faits sont interprétés au travers de ce verre de couleur (et parfois déformant) et d’un autre côté, ils sont tous classés par rapport au schéma révolutionnaire inclus dans le mythe. Les milieux révolutionnaires (par exemple, en France, tous les groupes d’extrême gauche) présentent des ressemblances remarquables avec les mythes religieux ; on vit dans le mythe comme si la révolution allait de soi. Elle occupe tellement de place dans la cervelle et dans le cœur, que tout y est ramené sans aucun esprit critique ni discernement d’aucun ordre. Elle est devenue évidence. Evidence formelle, bien sûr puisqu’elle n’est pas là, mais évidence telle que rien ne peut plus lui être étranger ou lointain. Il n’est évidemment plus nécessaire de rien prouver, ni de rien connaître du réel ; le mythe remplace la réalité. Nous sommes dans le mythe, (le mythe politique lui, n’est pas farouche), c’est-à-dire, dans ce contexte au niveau de la propagande, et du mensonge, de l’illusion finalement . Plus on se berce de l’illusion révolutionnaire, plus on utilise son langage et ses concepts, plus on détruit la possibilité réelle de la révolution par le moyen de la banalisation.

Date de création : 19/12/2007 @ 00:01
Dernière modification : 19/12/2007 @ 00:07
Catégorie : Sciences politiques
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